Les infractions routières sont de celles qui peuvent dans certains cas entrainer la responsabilité des personnes morales et/ ou de leur représentant. En effet, nombre de sociétés octroient à leurs salariés, un véhicule de fonction, ou de service. La distinction entre les deux se faisant essentiellement entre le véhicule attribué à un salarié (généralement un cadre de l’entreprise), comme élément de rémunération en nature, car ce dernier pourra jouir de l’usus dudit véhicule, ce même à titre privé, de celui attribué à un salarié pour les besoins de sa activité professionnelle uniquement, et qui ne devra logiquement utiliser le véhicule qu’à des fins purement professionnelles.
La responsabilité de la personne morale ne pourra être engagée, dans une certaine mesure, qu’en cas d’impossibilité pour l’agent de Police judiciaire ayant constaté l’infraction, d’identifier directement et sans ambiguïté, l’auteur de l’infraction. En effet, dans cette hypothèse, la question des poursuites et sanction ne se pose pas, car le délinquant routier aura pleinement été identifié lors de son interception.
La question n’aura donc d’intérêt que dans le cadre de contrôles automatisés, plus communément appelés radars fixes, mobiles ou encore la nouvelle génération de radar-tronçon. Le fait que la photographie prise par l’appareil de mesure ne permette pas d’identifier formellement le conducteur n’est pas un élément prépondérant pour la partie poursuivante (ministère public, ou officier du ministère public).
En effet, lors du relevé de l’infraction par un appareil de mesure, l’agence Nationale de Traitement Automatisé des Infractions (ANTAI), procédera à un traitement purement administratif de l’infraction, en procédant à l’envoi d’un relevé de l’infraction, ainsi que des sanctions attenantes au titulaire de la carte grise, à la personne au nom de laquelle le véhicule est immatriculé.
A qui incombe la responsabilité pénale ou pécuniaire relative à l’infraction ?
Les textes sont clairs, et l’article L 121-3 du Code de la route énonce deux principes. Tout d’abord il prévoit que « …le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue pour des contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées… », mais prévoit également que « La personne déclarée redevable en application des dispositions du présent article n’est pas responsable pénalement de l’infraction».
A qui incombe la responsabilité pécuniaire : représentent légal ou personne morale ?
La Cour de cassation affirme par une jurisprudence constante que, « …lorsque le certificat d’immatriculation d’un véhicule verbalisé pour excès de vitesse est établi au nom d’une personne morale, seul le représentant légal de celle-ci peut être déclaré redevable pécuniairement de l’amende encourue et non la société elle-même… ». La Haute cour a également affirmé ce même principe lorsqu’un véhicule avait été loué par la société- personne morale.
Qu’en est-il si le dirigeant d’entreprise dénonce le conducteur, qui lui-même conteste l’utilisation du véhicule ?
On a ici toujours une appréciation aussi sévère, et qui rejoins le point développé ci-dessus. En effet, la Chambre Criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt du 17 avril 2013, a une fois de plus retenu la responsabilité du chef d’entreprise. Dans l’affaire citée, un chef d’entreprise avait dénoncé un salarié, qui lui-même a indiqué qu’il n’était pas le conducteur au moment des faits et qu’aucun élément probant ne pouvait l’identifier « en l’absence de carnet de bord et de suivi journalier des nombreux salariés susceptibles [d’utiliser le véhicule] ».
Le Juge, constatant que l’identification formelle du conducteur était impossible, a relaxé le salarié.
Suite à un pourvoi introduit par le ministère public, la Cour de cassation, a jugé qu’en l’absence d’identification de l’auteur d’un excès de vitesse, seul le représentant légal de la société titulaire du certificat d’immatriculation ou locataire du véhicule peut, en application des dispositions de l’article L 121-3 du Code de la route, être déclaré pécuniairement redevable de l’amende encourue ».
Conclusion: il ne suffit pas pour le dirigeant de la société ou le locataire (société) d’un véhicule, de dénoncer un salarié, mais on demande également à ce dernier de prouver les faits qu’il avance, en prouvant c’était ce salarié qui conduisait le véhicule au moment des faits (par un document probant établissant la « traçabilité » des conducteurs).
Néanmoins, si le dirigeant d’entreprise demande la photographie prise par le radar, et démontre qu’il n’était n’est pas la personne au volant, l’exonération est totale. En effet, la jurisprudence retient de façon constante que ne pouvait être reconnu responsable pénalement ni redevable pécuniairement un titulaire alors que le cliché met en évidence que le conducteur est de sexe opposé (Tribunal de Police d’Angers 11 février 2003, Cass Crim 17 février 2004, et Cass Crim 1er avril 2008).